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Le Club de Lecture de la Librairie du Tram

METAQUINE - UN ROMAN D'ANTICIPATION

Publié le 21 Décembre 2016 par Marie in Les Lectures de Marie

Un roman d'anticipation suisse romand à la couv' moche. Cela ne donne pas forcément envie. Je vous l'accorde volontiers mais Métaquine est édité par L'Atalante, ma maison de SF préférée, n'en déplaise aux fans du Bélial.

La Panacée... et si le remède à tous nos maux existait vraiment ? Un médicament qui disciplinerait les enfants, les plus dissipés devenant de bons élèves ? Un médicament qui accroîtrait la productivité du travailleur ? Qui soignerait la dépendance ? Qui supprimerait les états d'âmes ?
Un labo pharmaceutique détenant le brevet de cette molécule miracle met en place une stratégie globale, mondiale pour en faire un incontournable, littéralement ; à l'école, au travail, dans la vie civile... Tout le monde s'arrache la Métaquine à part quelques irréductibles méfiants. Seulement, toute médaille a son revers et d'inquiétants effets secondaires apparaissent.

C'est un roman choral en deux (gros) tomes. Parlons-en du reste de ces deux tomes. L'un n'est pas la suite de l'autre, c'est d'un seul tenant coupé un peu au petit bonheur la chance. Si vous ne lisez que le premier tome, vous ne verrez en aucune manière le grand dessein de l'auteur mais seulement une sorte de pamphlet, alignant des dénonciations faciles sur les thèmes complotistes « les médias nous mentent », « les politiciens sont véreux », « on est tous manipulés ».
Dommage car ce tome est dense ; les légers décalages temporels, sans linéarité classique, créent une grande tension même si l'histoire n'avance pas très vite, les sept personnages parlant à tour de rôle.
Il faut attendre la moitié du second tome pour atteindre le paroxysme, qui n'est pas sans rappeler Lovecraft, lorsque tout se mélange, réel, virtuel, dimensions, espaces temporels... Ce second tome aborde aussi les thèmes les plus ardus de la science cognitive et malgré les explications, je n'ai pas toujours tout compris :

« Risquons une comparaison avec les sports nautiques. Pour figurer la manière dont le cerveau se connecte aux processeurs à Qubits, imaginons que la conscience est une surfeuse inexpérimentée. Une jeune fille en combinaison moulante qui tantôt glisse sur sa planche, luttant courageusement contre les flots déchaînés, et tantôt perd l'équilibre et se retrouve à barboter dans l'écume.
De même que notre débutante réussit un instant à monter sur les vagues, la conscience portée par la cohérence quantique chevauche provisoirement la crête mouvante des possibles, quand se produit la décohérence, l'équilibre se rompt. Soudain la mer qui soutenait l'apprentie championne se dérobe et la surfeuse bascule tête la première dans le bain de la réalité classique » (p.585).

La technique de reprendre la dernière phrase du chapitre précédent pour ouvrir le nouveau est une technique d'écriture bien connue ; elle est intéressante car elle fait le liant d'un puzzle qui se met en place. Cependant, elle est utilisée de façon tellement systématique et littérale que la structure narrative en devient mécanique.

Quant à la langue utilisée, je l'ai trouvée assez pauvre. Ce style familier, façon « j'écris comme je parle (mal) » est récurrent dans les livres parus récemment que j'ai lus. Je me répète certes mais n'est pas Céline qui veut. D'autant que la langue évoluant rapidement, cela a tendance à ringardiser rapidement un roman. Mais je préfère me dire que c'est utilisé ici sciemment, pour souligner davantage la déshérence de la maîtrise du langage nous permettant d'appréhender le monde.

Le contenu maintenant. François Rouiller dénonce non seulement les manipulations du lobby pharmaceutique mais surtout comment sont largement exploités par les « élites » notre complaisance et notre besoin de croire à ces remèdes, biaisé par notre envie de bonheur, succès et beauté. Le storytelling remplace le socle des valeurs communes qui fondent une société. Il est également abordé à mon sens le besoin de... de quoi du reste ? De spiritualité ? De religion ? Vous savez ce sursaut d'obscurantisme lorsqu'on franchit des frontières scientifiques et technologiques majeures.

En résumé, c'est un assez bon roman qui nous alerte de façon crédible sur ce qui pourrait advenir de nous à brève échéance.

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